Le hold up planétaire : 10 ans après – partie 2

Suite de l’article précédent concernant « Le Hold-Up planétaire » de Roberto Di Cosmo.

Comme pour le précédent article, je cite des morceaux du texte en les éclairant avec 10 ans de recul. Et la suite commence de manière assez « hard »

Page 38 :

« […]Or, Microsoft se contente souvent de vendre la version bêta comme un produit final. Windows 3.0, par exemple, était pratiquement inutilisable : il fallait tout le temps redémarrer — en jargon informatique rebooter — sa machine. Et il était très difficile d’imprimer. Une honte ! Alors, Microsoft a corrigé les bugs et sorti Windows 3.1… que les utilisateurs ont, bien sûr, dû acheter à nouveau. L’éditeur de Seattle utilise ainsi très habilement ses dizaines de millions de clients de par le monde comme autant de bêta-testeurs. Et, en plus, il a l’aplomb de les faire
payer pour ce « privilège » ! D’ailleurs, cela continue : la version bêta de Windows 98, disponible au printemps dernier à certains salons informatiques, coûtait 30 dollars. Qu’on fasse payer une version bêta inutilisable, c’est du jamais vu dans l’industrie du software ![…] »

Doit-on rajouter avec le recul du temps un certain Windows Millenium ou plus récemment un certain Windows Vista et de son bug qui rendait la copie de fichiers atrocement lente ?

Page 40 :

« […]Tel est pourtant le lot quotidien des clients de Microsoft. En effet, pas question de lire correctement un document écrit en Word 7.0 avec un logiciel Word 5.0, par exemple. Ou d’espérer ouvrir un fichier en Word pour Windows avec un traitement de texte Word 6.0 pour Macintosh. Je l’ai appris à mes dépens en m’escrimant un jour à essayer d’ouvrir un formulaire télé-
chargé sur un site dépendant de la Commission européenne…
Résultat : notre laboratoire a dû acheter un gros PC avec Windows 95 et Office, dont on se serait bien passés, dans le seul but de pouvoir lire ces documents importants. La loupe klingonienne n’est pas aussi imaginaire qu’on le croit.[…] »

Tiens, ce problème d’incompatibilité entre versions de MS-Word me fait penser au format OpenXML de MS-Office 2007, bien entendu incompatible avec les versions précédentes, bien qu’un filtre d’enregistrement au format MS-Word précédent existe…

Pages 41 et 42 :

« Rappelons-nous que les premiers PC IBM (avec le 8088 de Intel) tournaient à une fréquence d’horloge de 4,77 MHz.
Aujourd’hui, les processeurs Pentium II d’Intel tournent à 400 MHz. Mais, presque quinze ans plus tard, Microsoft Word est bien loin d’aller cent fois plus vite. « 

Tiens, pourquoi une telle course aux armements pour lancer un traitement de texte, alors que le gain de vitesse dans ce domaine ne peut s’acquérir que par l’apprentissage de la dactylographie ?

Pages 43 et 44 :

« […]Un premier exemple : depuis les origines, c’est-à-dire le système DOS, Microsoft utilise dans ses produits une méthode obsolète de gestion de fichiers… Si vous êtes utilisateur de Windows, vous connaissez sans doute le logiciel DeFrag. Quand vous le lancez, l’ordinateur affiche une panoplie de petits carreaux de différentes couleurs qui bougent dans tous les sens, pendant que le disque dur travaille intensément.
Explication du manuel Windows : plus on utilise un ordinateur, plus son disque se fragmente et plus la machine est lente.
Alors, pour pallier cet inconvénient, il faut régulièrement faire appel à DeFrag, qui « défragmente » le disque pour qu’il tourne plus vite. Ah bon ! Comment se fait-il alors que les machines utilisant Linux, FreeBSD, ou tout autre dérivé d’Unix n’aient pas cette contrainte ? Sur ces ordinateurs, au contraire, dans des conditions d’usage normales, le disque est toujours peu fragmenté, et plus on l’utilise, moins il se fragmente…
C’est que ces systèmes fonctionnent très différemment de Windows. Pour rester dans un monde familier, imaginez un instant que votre disque dur soit le ministère des Finances. Et
que vos fichiers, mémorisés sur le disque, correspondent aux dossiers que les fonctionnaires archivent dans une armoire géante, comportant quelques millions de petits tiroirs. Vous
comprendrez alors aisément que si vous cherchez un dossier complet — celui du Crédit Lyonnais, par exemple —, votre tâche sera plus facile si ses divers éléments constitutifs se trouvent dans des tiroirs voisins, plutôt qu’éparpillés aux quatre coins de l’armoire. Pour l’information, c’est pareil : vous accéderez plus facilement aux données qui vous intéressent, si elles sont rangées dans des fichiers contigus, plutôt que dispersées ou « fragmentées ».
Le problème est donc de garder cette armoire bien rangée après chaque utilisation. Or, que fait Windows ? Il agit comme un assistant peu scrupuleux : quand un dossier est bouclé, il jette ses éléments à la corbeille. Et quand vous lui donnez les pièces d’un nouveau dossier, il les sépare en petits groupes de documents, qu’il range au hasard dans les premiers tiroirs vides qui se présentent. Du coup, il demande un budget supplémentaire pour embaucher, tous les week-ends, une cohorte de stagiaires (DeFrag), qui s’évertuent à remettre l’armoire en ordre.
Linux, au contraire, se comporte comme un assistant modèle : quand vous lui demandez de jeter des dossiers, il établit systématiquement la liste des tiroirs ainsi libérés. Ensuite, pour en
ranger un nouveau, il recherche dans sa liste une suite de tiroirs vides contigus de taille suffisante. Vous conviendrez avec moi que pas un responsable hiérarchique ne serait assez fou pour embaucher le premier assistant, qui coûte cher et qui travaille mal, au lieu du second, quasi bénévole et beaucoup plus efficace. C’est pourtant ce qui se passe tous les jours, quand des uti-
lisateurs choisissent Windows.
En résumé, la propagande commerciale de Microsoft embobine les utilisateurs en leur racontant que DeFrag accélère la machine… alors qu’en réalité, c’est Windows qui la ralentit !
L’entreprise est donc assez puissante pour engendrer de graves distorsions de réalité : elle fait passer les défauts de ses logiciels pour des atouts indispensables. Dans les milieux informatiques, on emploie depuis longtemps une expression ironique, quand on tombe sur l’un de ces défauts : it’s not a bug, it’s a feature ! Ce n’est pas un défaut, c’est une fonctionnalité ![…] »

Dix ans plus tard, les disques sont des dizaines de fois plus volumineux et les défragmenteurs toujours autant utilisés… Même si la fat32 a laissé sa place à NTFS…